Yann Gré - Avocat à Créteil - www.yanngre.com

mardi 29 décembre 2015

Contester le Taux Effectif Global (TEG) de son prêt peut rapporter gros !

Le Taux Effectif Global (TEG) de nombreux prêts immobiliers est erroné.

Les personnes ayant contracté un crédit immobilier affecté par une telle irrégularité s'interrogent souvent sur l'intérêt pratique d'initier une procédure pour contester le TEG de leur prêt.

Chaque situation est différente et doit donner lieu à une évaluation approfondie.

Un exemple concret peut cependant être très parlant.

Ainsi, suite à un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris, des clients du Cabinet de Maître Yann Gré ont reçu le 21 décembre 2015 un virement de 52.075,68 Euros correspondant au remboursement d'un trop perçu d'intérêts.


Ils rembourseront en outre leur prêt jusqu'en 2036 avec des intérêts au taux nominal de 0,93 % au lieu de 3,56 %.


L'intérêt d'une telle action est donc incontestable.

mercredi 11 novembre 2015

L'insaisissabilité de la résidence principale d'un entrepreneur individuel


La loi du 6 août 2015, dite loi MACRON, a beaucoup fait parler d'elle.

L'une des mesures phares issues de cette loi est pourtant passée en grande partie inaperçue.

Elle a cependant une importance primordiale pour tous les entrepreneurs individuels : commerçants, artisans, agriculteurs, autoentrepreneurs…

Aux termes de l'article 206 de cette loi, la résidence principale d'un entrepreneur individuel ne pourra plus faire l'objet d'une saisie immobilière par ses créanciers au titre de ses dettes professionnelles.

Cette réforme ne s'appliquera que pour les créances nées après le 7 août 2015 et ne sera pas opposable à l’administration fiscale en cas de manœuvres frauduleuses ou d’inobservation grave et répétée des obligations fiscales de l'entrepreneur concerné.

Il s'agit d'une avancée majeure pour les professionnels concernés.

L'article L 526-1 du Code de Commerce, issu de cette réforme précise désormais que :

Par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil, les droits d'une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale sont de droit insaisissables par les créanciers dont les droits naissent à l'occasion de l'activité professionnelle de la personne. Lorsque la résidence principale est utilisée en partie pour un usage professionnel, la partie non utilisée pour un usage professionnel est de droit insaisissable, sans qu'un état descriptif de division soit nécessaire. La domiciliation de la personne dans son local d'habitation en application de l'article L. 123-10 du présent code ne fait pas obstacle à ce que ce local soit de droit insaisissable, sans qu'un état descriptif de division soit nécessaire.

Par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil, une personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante peut déclarer insaisissables ses droits sur tout bien foncier, bâti ou non bâti, qu'elle n'a pas affecté à son usage professionnel. Cette déclaration, publiée au fichier immobilier ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au livre foncier, n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent, après sa publication, à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant. Lorsque le bien foncier n'est pas utilisé en totalité pour un usage professionnel, la partie non affectée à un usage professionnel ne peut faire l'objet de la déclaration qu'à la condition d'être désignée dans un état descriptif de division.

L'insaisissabilité mentionnée aux deux premiers alinéas du présent article n'est pas opposable à l'administration fiscale lorsque celle-ci relève, à l'encontre de la personne, soit des manœuvres frauduleuses, soit l'inobservation grave et répétée de ses obligations fiscales, au sens de l'article 1729 du code général des impôts.

dimanche 8 novembre 2015

Cautionnement donné par un particulier : la mention manuscrite de la durée de l’engagement est obligatoire.


Les particuliers qui souscrivent par acte sous seing privé un engagement de cautionnement auprès d’un créancier professionnel doivent faire précéder leur signature d’une mention manuscrite obligatoire prévue par l’article L 341-2 du Code de la Consommation.

A défaut, l’engagement de la caution est nul.

Par un arrêt en date du 9 juillet 2015, (pourvoi n°14-24.287), la première Chambre Civile de la Cour de Cassation a jugé que, même si la loi ne prévoit pas « la manière dont la durée de l’engagement de caution doit être exprimée dans la mention manuscrite, il n’en demeure pas moins que, s’agissant d’un élément essentiel permettant à la caution de mesurer la portée exacte de son engagement, cette mention devait être exprimée sans qu’il soit nécessaire de se reporter aux clauses imprimées de l’acte ».

La Cour de Cassation indique donc qu’en l’absence de la mention manuscrite de la durée de l’engagement de cautionnement, cet engagement est frappé de nullité.

Cette décision signifie en conséquence que dans toutes les hypothèses de cautionnement souscrit par un particulier au profit d’un professionnel, en l’absence d’une telle mention manuscrite, la caution sera déchargée de ses obligations.

La portée de cet arrêt apparaît particulièrement importante.

Son texte complet est le suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 25 mars 2014), que, par actes sous seing privé du 20 juillet 2009, MM. Y… et X… se sont portés, chacun, caution solidaire d’un prêt consenti par la Société marseillaise de crédit (la banque), laquelle les a assignés en exécution de leurs engagements ;

 Attendu que la banque fait grief à l’arrêt de prononcer la nullité de chacun des engagements de caution et de rejeter, en conséquence, sa demande, alors, selon le moyen, que le formalisme imposé par l’article L. 341-2 du code de la consommation vise à assurer l’information complète de la caution quant à la portée de son engagement ; que ces dispositions légales ne fixent pas la manière dont la durée de l’engagement doit être mentionnée dans l’acte de cautionnement ; qu’il suffit que la caution ait au travers des mentions portées une parfaite connaissance de l’étendue et de la durée de son engagement ; qu’il ressort des énonciations de l’arrêt que les mentions manuscrites portées sur les actes de cautionnement litigieux étaient ainsi rédigées : « En me portant caution de la SARL Odysseelle dans la limite de la somme de 69 000 euros (soixante neuf mille euros) couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de l’opération garantie + deux ans (…) » ; qu’en énonçant que la durée de l’engagement de caution devait être précisée clairement dans la mention manuscrite sans qu’il soit nécessaire de se reporter aux clauses imprimées de l’acte, et qu’en conséquence l’imprécision de cette mention affectait la compréhension de la durée des engagements de caution et par suite leur validité quand bien même la durée de l’opération garantie, en l’occurrence quatre-vingt-quatre mois, était indiquée en première page des actes de cautionnement, la cour d’appel a violé l’article L. 341-2 du code de la consommation ;

 Mais attendu que l’arrêt retient, à bon droit, que si les dispositions de l’article L. 341-2 du code de la consommation ne précisent pas la manière dont la durée de l’engagement de caution doit être exprimée dans la mention manuscrite, il n’en demeure pas moins que, s’agissant d’un élément essentiel permettant à la caution de mesurer la portée exacte de son engagement, cette mention devait être exprimée sans qu’il soit nécessaire de se reporter aux clauses imprimées de l’acte ; que la cour d’appel en a exactement déduit que les engagements de caution litigieux encouraient la nullité ;

 D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

 PAR CES MOTIFS :

 REJETTE le pourvoi.

dimanche 27 septembre 2015

Saisie Immobilière et prescription : un règlement effectué postérieurement à la déchéance du terme n’interrompt pas la prescription biennale.


L’article L 137-2 du Code de la Consommation précise que l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Par un arrêt rendu le 28 novembre 2012, la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation (pourvoi n°11-26508) avait jugé que le délai de prescription de deux ans prévu par l’article L 137-2 du Code de la Consommation s’appliquait, notamment, aux crédits immobiliers consentis aux particuliers par des organismes de crédit.

L’arrêt rendu le 10 juillet 2014 par la Première Chambre Civile de cette Cour (pourvoi n° 13-15511) précisait que « le point de départ du délai de prescription biennale … se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action concernée, soit, dans le cas d’une action en paiement au titre d’un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé ».

La question se posait cependant souvent, en pratique, de savoir si un règlement effectué postérieurement à ce « premier incident non régularisé » était susceptible d’interrompre la prescription biennale.

L’arrêt rendu le 9 juillet 2015 (pourvoi n° 14-15314) par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation apporte une solution bienvenue à cette question.

Cet arrêt précise en effet qu’ « aucun paiement ultérieur ne valoir régularisation d’un incident de paiement » et interrompre la prescription.

Dans l’affaire qui lui était soumise, la Cour de Cassation a considéré que le prononcé la déchéance du terme avait rendu la créance exigible de sorte que la Banque aurait dû initier une procédure de saisie immobilière dans un délai de deux ans, même en présence de règlements effectués durant cette période par le débiteur.

Il apparaît donc, au vu de cette décision, que toute procédure initiée par une Banque contre un débiteur non professionnel au titre d’un contrat de prêt plus de deux ans après le prononcé de la déchéance du terme devra être déclarée prescrite, même si le débiteur a effectué des règlements dans l’intervalle.

Le texte complet de cette décision est le suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint Denis, chambre d'appel de Mamoudzou, 17 janvier 2014), que la société BRED Banque populaire (la banque), qui avait consenti à M. X..., suivant acte authentique du 14 décembre 2006, un prêt immobilier dont certaines échéances sont demeurées impayées, a engagé une procédure de saisie immobilière à l'encontre du débiteur qui a soutenu que l'action de la banque était tardive ; 

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de dire son action forclose, alors, selon le moyen : 

1°/ que le juge ne peut méconnaître les limites du litige, telles qu'elles sont définies par les conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce où elle était uniquement saisie par la banque exposante de l'appel d'une décision du juge de l'exécution statuant en matière de saisie immobilière et non d'une action en paiement, la cour d'appel en déclarant forclose « l'action en paiement » de la banque, a méconnu les termes du litige et violé, en conséquence, les dispositions de l'article 4 du code de procédure civile ; 

2°/ que la procédure de saisie immobilière n'est pas soumise au délai de forclusion de l'article L. 311-52 du code de la consommation selon lequel les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ; que la cour d'appel, en énonçant, pour dire forclose l'action de la banque agissant en matière de saisie immobilière, que cette dernière devait avoir commencé les opérations de recouvrement par une signification d'huissier de justice, soit en l'espèce s'agissant d'un prêt hypothécaire résultant d'un acte authentique, un commandement de payer valant saisie, dans le délai de deux ans à compter du premier incident de payer non régularisé, a violé, par fausse application, l'article L. 311-52 du code de la consommation ; 

3°/ que le juge, qui doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut fonder sa décision sur des moyens relevés d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs explications ; qu'en énonçant, pour dire forclose l'action en paiement de la banque à l'encontre du débiteur, que les conditions générales du contrat de prêt immobilier avaient prévu au titre « contentieux » que les actions devaient à peine de forclusion être engagées dans un délai de deux ans de l'événement qui leur avait donné naissance et que les parties avaient décidé contractuellement que ce délai biennal était un délai préfix, sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs éventuelles observations sur ce point, la cour d'appel qui s'est fondée sur un moyen qu'elle a relevé d'office a méconnu le principe du contradictoire et ainsi violé l'article 16 du code de procédure civile ; 

4°/ que les parties au contrat de prêt avaient convenu que les actions engagées devant le tribunal d'instance étaient soumises à un délai de forclusion qui est préfix ; que la cour d'appel, qui était saisie de l'appel d'une décision du juge de l'exécution statuant en matière de saisie immobilière, en se fondant, pour dire forclose l'action de la banque, sur la circonstance que les conditions générales du contrat de prêt immobilier avaient prévu au titre « contentieux » que les actions devaient à peine de forclusion être engagées dans un délai de deux ans de l'événement leur ayant donné naissance et que les parties avaient décidé contractuellement que ce délai biennal était un délai préfix, a violé l'article 1134 du code civil ; 

5°/ que lorsque le litige a pour cause la défaillance de l'emprunteur, le point de départ du délai de forclusion de l'action en paiement est le premier incident de paiement non régularisé et qu'à ce titre, si un premier incident survient, mais que l'emprunteur continue par la suite à rembourser partiellement les sommes empruntées, ces paiements doivent s'imputer sur les échéances les plus anciennes, de sorte que l'incident est considéré comme régularisé, et que le délai de forclusion ne peut courir qu'à compter d'un nouvel impayé non régularisé ; qu'en l'espèce où le premier incident de paiement remontait au 30 janvier 2009 et où l'emprunteur avait par la suite continué à effectuer des remboursements de l'emprunt, la cour d'appel en énonçant, pour dire forclose l'action en paiement de la banque à l'encontre du débiteur, que ces versements n'étaient pas susceptibles de permettre une régularisation reportant le premier incident de paiement non régularisé, de sorte que la BRED devait engager son action en paiement au plus tard le 30 janvier 2011, la cour d'appel a violé l'article L. 311-52 du code de la consommation, ensemble l'article 1256 du code civil ; 

Mais attendu, d'abord, que la saisie immobilière est une action en paiement en ce qu'elle tend au recouvrement de la créance ; qu'ensuite, l'arrêt constate que la déchéance du terme a été prononcée le 5 juin 2009, de sorte que la créance était devenue exigible à cette date, sans qu'aucun paiement ultérieur puisse valoir régularisation d'un incident de paiement ; qu'enfin, la cour d'appel a retenu que le premier acte régulier de poursuite, constitué par le commandement de payer valant saisie, n'avait été délivré que le 24 décembre 2012, de sorte qu'ayant ainsi fait ressortir qu'aucun acte suspensif ou interruptif de prescription n'avait été accompli, elle a pu en déduire qu'était tardive l'action de la banque, qui avait laissé s'écouler plus de deux années sans accomplir aucun acte de poursuite, peu important dans ces circonstances qu'elle ait qualifié le délai de forclusion ou de prescription ; que le moyen, qui est inopérant en sa troisième branche, est mal fondé pour le surplus ; 

PAR CES MOTIFS : 

REJETTE le pourvoi.

mardi 25 août 2015

Taux Effectif Global (TEG) : la Cour de Cassation rappelle que le taux d’intérêt conventionnel doit être calculé sur l’année civile et non sur 360 jours et précise que les intérêts intercalaires doivent être pris en compte dans le calcul du TEG.

Yann Gré, Avocat à la Cour
Par un récent arrêt en date du 17 juin 2015 (pourvoi n°14-14326), la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a rendu une décision importante concernant le calcul du Taux Effectif Global (TEG), ainsi que du Taux d’Intérêt Conventionnel d’un prêt.

Elle a en effet rappelé, d’une part, que « le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non professionnel ».

Elle a pour cela censuré un arrêt de Cour d’Appel qui avait opéré une distinction entre « Taux Conventionnel » et « Taux Effectif Global ».

L’obligation de calcul sur l’année civile s’applique donc tant au taux d’intérêt contractuel du prêt qu’au Taux Effectif Global.

La Cour de Cassation a, d’autre part, précisé que les intérêts intercalaires et les cotisations d’assurance payés au titre d’une période de franchise expressément prévue par le contrat de prêt doivent être intégrés dans le calcul du TEG.

Ce point est particulièrement intéressant puisque toutes les offres de prêt immobilier de certaines banques comportent une clause indiquant que ces frais, importants, ne sont pas inclus dans le TEG.

Il apparaît donc, au vu de cette décision, que de nombreux prêts sont susceptibles d’être contestés, la sanction de l’irrégularité du TEG étant le remplacement du taux d’intérêt contractuel par le taux légal (0,99 % actuellement).

Cet arrêt a été publié au Bulletin de la Cour de Cassation, ce qui signifie que la Cour a voulu lui donner une importance particulière.

Le texte complet de cette décision est le suivant :

« Attendu que la caisse de Crédit mutuel de Saint-Martin (la banque) a consenti à M. X... et à Mme Y... un prêt immobilier et que, ayant constaté la défaillance des emprunteurs, elle les a assignés afin d'obtenir la vente forcée de l'immeuble ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses contestations portant sur l'application du taux d'intérêt conventionnel et d'ordonner la vente forcée de l'immeuble par adjudication judiciaire, alors, selon le moyen, qu'en cas de renégociation de prêt, les modifications au contrat de prêt initial sont apportées sous la forme d'un avenant qui comprend, d'une part, un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance le capital restant dû en cas de remboursement anticipé et, d'autre part, le taux effectif global ainsi que le coût du crédit calculés sur la base des seuls échéances et frais à venir ; que le report de l'exigibilité des mensualités d'un contrat de prêt constitue une renégociation du prêt pour lequel la banque est tenue d'établir un avenant conformément aux prescriptions édictées par l'article L. 312-14-1 du code de la consommation ; qu'en statuant en sens contraire en disant, après avoir relevé que la banque avait proposé par courrier du 6 octobre 2010 de renégocier le paiement des échéances mensuelles du prêt en reportant celles comprises pour la période du 15 octobre 2010 au 15 mars 2011, au 15 mai 2022, que «  il n'y a donc pas lieu de faire application de (l') article L. 312-14-1 du code de la consommation prévoyant la remise à l'emprunteur d'un avenant au contrat initial dans les hypothèses de renégociation du prêt », la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 312-14-1 du code de la consommation ;

Mais attendu que le seul fait pour le prêteur d'accorder une facilité de paiement à l'emprunteur ne caractérise pas une renégociation du prêt ;

Et attendu qu'ayant constaté que, par lettre du 6 octobre 2010 adressée à M. X... et à Mme Y..., la banque avait seulement accepté, à la demande des emprunteurs, de reporter en fin de contrat les échéances dues pour la période comprise entre le 15 octobre 2010 et le 15 mars 2011, les autres conditions du prêt demeurant inchangées et aucune incidence n'étant invoquée sur les sommes dues aux titres des frais et intérêts, la cour d'appel en a exactement déduit que ne s'imposait pas aux parties le formalisme requis en cas de renégociation par l'article L. 321-14-1 du code de la consommation ; que le moyen n'est pas fondé;

Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 313-1 du code de la consommation ;

Attendu que, pour décider que n'ont pas à être pris en compte, pour le calcul du taux effectif global du prêt, les intérêts intercalaires payés par les emprunteurs les 15 avril et 15 mai 2007, l'arrêt retient qu'ils sont dus au titre de la période de franchise prévue par le contrat, qui exclut du taux effectif global les intérêts et cotisations d'assurance prélevés pendant cette période qui précède l'amortissement du capital emprunté ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la durée de la période de franchise et les intérêts s'y rapportant étaient précisément prévus par le contrat et qu'étant ainsi déterminés lorsqu'il a été signé, ils relevaient des intérêts, frais, commissions et rémunérations de toute nature qui sont une condition de l'octroi du crédit aux conditions acceptées par l'emprunteur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation ;

Attendu que, pour rejeter la contestation fondée sur le calcul du taux conventionnel de crédit par référence à l'année bancaire de trois cent soixante jours, l'arrêt retient, d'une part, que si le taux effectif global doit être calculé sur une année civile, rien n'interdit aux parties de prévoir un taux conventionnel calculé sur une autre base, d'autre part, que le taux de la mensualité correspond bien au taux effectif global indiqué ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le taux conventionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile dans tout acte de prêt consenti à un consommateur ou à un non-professionnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe le montant de la créance de la caisse de Crédit mutuel de Saint-Martin à la somme de quatre cent soixante dix huit mille neuf cent trois euros et dix-huit centimes (478 903,18 euros) en principal et intérêts, arrêtée au 21 décembre 2011, outre intérêts conventionnels au taux de 4,90 % et frais postérieurs à cette date, l'arrêt rendu le 16 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;

Condamne la caisse de Crédit mutuel de Saint-Martin aux dépens ».

mardi 7 juillet 2015

Publication du Taux d'Intérêt Légal pour le second semestre 2015

Le taux d'intérêt légal est désormais calculé semestriellement.

Aux termes de l'arrêté du 24 juin 2015, ce taux s'élève, pour le second semestre 2015 à 0,99 % dans le cas général et à 4,29 %, pour les créances des personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels. 

Le texte de cet arrêté peut être consulté en cliquant sur ce lien.

mercredi 20 mai 2015

Intérêts calculés sur 360 jours et prescription : une décision particulièrement importante de la Cour d’Appel de Versailles


Aux termes d’un arrêt rendu du 19 juin 2013, la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation (pourvoi n° 12-16.651) a jugé que « le taux de l’intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l’acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l’intérêt légal, être calculé sur la base de l’année civile ».

Selon cette décision, lorsque les intérêts sont calculés sur 360 jours au lieu d’être calculés sur l’année civile, la nullité de la clause d’intérêt doit être prononcée et les intérêts au taux contractuel doivent être remplacés par des intérêts au taux légal.

De très nombreux prêts sont concernés, de multiples banques calculant leurs intérêts sur 360 jours de manière systématique.

Toutefois, lorsque ces dossiers viennent devant les Tribunaux, un problème peut se poser, à savoir, celui de la prescription, lorsque le prêt remonte à plus de cinq ans.

Par ailleurs, le problème se pose parfois de savoir si la simple présence dans le contrat de prêt d’une disposition indiquant que les intérêts sont calculés sur 360 jours suffit à entrainer la nullité de la clause d’intérêt.

L’arrêt rendu le 2 avril 2015 par la 16ème Chambre de la Cour d’Appel de Versailles  (RG N° 13/08484) est particulièrement intéressant puisqu’il apporte dans les deux hypothèses une réponse très favorable à l’emprunteur.

Dans cette affaire, la Banque avait fait souscrire un prêt immobilier à un emprunteur comportant la clause suivante :

« les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé, les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapporté à 365 jours l'an »

La Banque avait par la suite poursuivi l’emprunteur devant le Tribunal en remboursement de ce prêt.

Ce dernier avait soulevé la nullité de la clause d’intérêt en raison de la présence de cette clause.

La Banque avait soutenu que cette demande de la nullité de la clause d’intérêt était prescrite, car le prêt remontait à plus de cinq ans.

La Cour d’Appel de Versailles précise, dans sa décision, que «  le prêt immobilier litigieux constitue un prêt dépourvu de caractère professionnel et consenti par un professionnel à deux consommateurs acquéreurs indivis, le délai de prescription de l'action en nullité de la stipulation d'intérêts ne courant pas à compter de la conclusion du contrat soit au jour de l'acceptation de l'offre selon cachet de la poste faisant foi, mais à la date à laquelle l'emprunteur a pris connaissance de l'irrégularité. Il est en effet de jurisprudence constante, que pour que le délai de prescription puisse courir à compter de la date de la convention, encore faut-il que l'emprunteur non professionnel ait été en mesure de déceler par lui-même, à la lecture de l'acte, l'erreur.

Or la clause contractuelle figurant au point 2 des conditions générales de l'offre de prêt, selon laquelle 'Toutes les sommes dues au titre d'un prêt notamment tout commission ou contribution.....les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an. En cas de remboursement anticipé, les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exact de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisons que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapporté à 365 jours l'an ', n'apparaît pas accessible par l'ambiguïté de ses termes, relatifs tant au taux nominal qu'au taux effectif global, à un consommateur profane ; ce dernier n'est pas mis en mesure de comprendre, à sa lecture, l'incidence sur les charges du prêt de cette stipulation spécifique, qui procède à une distinction pouvant paraître absconse entre les régimes du taux nominal et du taux effectif global des intérêts. »

La Cour considère donc que la demande n’est pas prescrite, puisque la clause litigieuse n’est pas accessible, par l’ambigüité de ses termes, à un consommateur profane.

Elle rappelle par ailleurs, qu’ « en vertu de l'article L 313-1 du code monétaire et financier, le taux légal est fixé pour une année civile, et que l'article R 313-1 du code de la consommation précise qu'une année civile compte 365 jours ou pour les années bissextiles, 366 jours ».

La Cour précise qu’un « taux d'intérêt n'étant pas calculé sur une année civile s'il est expressément calculé sur 360 jours, comme tel est le cas en l'espèce, force est de constater par simple application des textes en vigueur, que le taux d'intérêt annuel nominal contractuel n'est pas valablement stipulé au contrat de prêt immobilier ».

Elle prononce en conséquence la nullité de la clause d’intérêt.

Au vu de cette décision, il apparaît, d’une part, que la simple mention du calcul des intérêts sur 360 jours suffit pour entrainer la nullité de la clause d’intérêt et, d’autre part, que cette nullité peut être soulevée, par une personne profane, plus de cinq ans après la souscription du prêt en présence d’une clause ambiguë telle que celle figurant dans le contrat de prêt litigieux.


Or, il s’avère qu’une clause identique figure dans de très nombreux contrats de prêt…

dimanche 4 janvier 2015

Publication de la Loi de Finances pour 2015

La loi de Finances pour 2015 a été promulguée le 29 décembre 2014 et publiée au Journal Officiel du 30 décembre 2014.

Cette loi avait été soumise au Conseil Constitutionnel, lequel par décision en date du 29 décembre 2014 a censuré ses articles 46, 79 et 117.

Elle peut être consultée en cliquant sur ce lien.

Interrogations concernant le RSI (Régime Social des Indépendants)



Le RSI (Régime Social des Indépendants) est depuis quelques mois au centre d’un important débat juridique.

De récentes décisions de justice posent en effet la question de la capacité à agir en justice de cet organisme.

Ainsi, deux décisions successives rendues par la Cour d’Appel de Limoges (arrêt du 10 octobre 2014), puis par le Juge des Référés du Tribunal de Grande Instance de Nice (ordonnance de référé du 11 décembre 2014) ont estimé que la Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants devait justifier de son inscription à un registre prévu par l’article L 411-1 du Code de la Mutualité et qu’en l’absence d’une telle justification, la qualité de cette Caisse pour agir en justice ne pouvait être vérifiée.

Ces deux décisions ont donc rejeté, pour ce motif, des demandes formées par la Caisse Nationale du RSI.

Il est cependant à noter que saisis d’arguments similaires, d’autres Tribunaux ont rendu des décisions contraires.

Cette question n’est donc pas tranchée.

Elle ne le sera que lorsque la Cour de Cassation aura statué.

Il s’agit, pour l’instant, de décisions isolées ayant une portée limitée, dont il n’est pas possible de tirer des conséquences d’ordre général.

Il n'y a donc bien évidemment pas lieu, pour les personnes concernées, de cesser de payer leurs cotisations au RSI.

Toutefois, ces décisions ont le mérite de soulever une question juridique intéressante.

La motivation retenue par le Juge des Référés du Tribunal de Grande Instance de Nice dans son ordonnance du 11 décembre 2014 est la suivante :

« Aux termes de l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

La demanderesse soutient que la Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants, faute de prouver son inscription au Conseil supérieur de la mutualité conformément à l'article L.411-I du code de la mutualité, n'a pas qualité pour agir et ne pouvait dès lors pas former la requête aux fins de constat d'huissier litigieuse.

La Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants expose néanmoins que son existence légale est assurée sans autre formalité ni publicité que son inscription au répertoire SIRENE et l'établissement d'un règlement intérieur soumis à l'approbation du ministre chargé de la sécurité sociale.

Si la Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants verse bien aux débats la justification de son inscription au répertoire SIRENE et une copie de son règlement intérieur, il est cependant nécessaire, afin de vérifier qu'elle possède la qualité pour agir, et conformément à un arrêt de la cour d'appel de Limoges du 10 octobre 2014, qu'elle justifie de son immatriculation au registre prévu par l'article L.411-1 du code de la mutualité.

En l'absence d'une telle justification, la qualité pour agir de la Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants ne pouvant être vérifiée, il convient de rétracter dans son intégralité l'ordonnance sur requête du tribunal de grande instance de Nice du 17 juin 2014 ayant autorise la défenderesse à faire exécuter par tout huissier de justice de son choix la mission de se rendre à la réunion d'information de l'association MLPS du 21 juin 2014 pour procéder à l'enregistrement des débats et retranscrire les propos tenus lors de la réunion ».